un village sans printemps

Écrit pour un rude village de haute Provence

Il y a des villages sans printemps dans les contrées du haut pays rebeillard

C’est au bout de l’infini , c’est la vallée sans printemps , c’est ce haut pays Rebeillard , d’ou depuis l’entrée des villages on confond terre et ciel , au soir tombant , les clochers des églises s’enlisent dans le givre qui glace le dernières velléités du ciel ,tout s’englue dans une boue éternelle ,tout devient opaque, les arbres baissent leurs têtes, courbaturés qu’ils sont depuis des années de pleurs blancs ,ils ne résistent plus , ils gémissent ,fantômes éternels et témoins de la pauvreté des chemins , de la dureté des nuits glaciales ,une cloche sonne au lointain , lointain si prés , si prés ,des hommes passent ,dos courbés , ou vont ils? De pauvres vieilles , des images , des fagots , des mansardes d’ou l’on voit a peine briller une lueur d’étoile ,une vie qui s’accroche au fil du temps , qui se perpétue dans l’odeur des foins qui tient chaud la nuit ,ces nuits interminables qui sentent le froid ,ou même les corps de femmes et d’hommes entrelacés n’arrivent plus a brûler de l’ardente communion d’amour ,les chiens se recroquevillent ,ils ont conscience que dehors , c’est la nuit des temps , cette nuit des temps qui porte humilité, ça ne servirait a rien d’aboyer , ça ne servirait a rien de japper , tout est immobilisme , c’est figé , ça fait presque peur , c’est lugubre ,c’est noir et tout froid ,les visages ne se dérideront jamais ici , comment vous faire comprendre ,et pourtant ça résiste sur cette lande brûlée ,ça rie même parfois ,du coin des lèvres . Paraît qu’Albert a recueilli une donzelle chez lui , sans doute l’a t-il ramené du gros bourg en bas ,en allant rapporter son labeur de lunetier , j’irai bien voir sa frimousse a celle la ,sa maison n’est pas loin a Albert ,si la hauteur de neige le permet ,on pourra boire le vin chaud , je pourrai la regarder , Albert est partageur, si elle a un joli minois ça me suffira , ça brûlera chaud dans mes veines ,il suffira qu’elle croise mon regard et qu’Albert me cligne de l’œil , après on lapera la soupe au vin chaud ,et puis si la tempête se lève ,si dehors ça hurle au vent mauvais ,ils iront se coucher dans la chambre de bois, moi, je ferai celui qui n’entend pas leurs ébats ,je m’allongerai sur le grabat ,prés de l’âtre , avec noiraud , le corniaud préféré d’ Albert ,j’attendrai le jour ,le jour blême , oui , vous savez , j’habite ce putain de village , pas très loin de la maison d’ Albert , un village sans printemps ……

bullit

oui village étrange...